J.R.R. Tolkien – Les Lais du Beleriand

Dans ce troisième volume de l'Histoire de la Terre du Milieu, furent rassemblés deux grands poèmes que Tolkien composa dans les années 1920, alors que son légendaire prenait forme sous une langue plus dense et plus solennelle : Le Lai des Enfants de Húrin et Le Lai de Leithian, deux chants majeurs issus des temps anciens.
Le Lai des Enfants de Húrin, premier de ces grands récits versifiés, retraçait le destin funeste de Túrin Turambar, fils d'Húrin, sur qui Morgoth avait jeté une malédiction. Exilé, fugitif, puis guerrier renommé, Túrin luttait sans relâche contre l'ombre, mais chaque victoire nourrissait son orgueil et précipitait sa perte. Le poème, écrit en vers allitératifs dans la tradition anglo-saxonne, décrivait avec âpreté la violence, la solitude et la chute d'un homme pris dans les filets d'un destin cruel. Bien que resté inachevé, ce lai dévoilait la sombre majesté d'un héros tragique.
Le second poème, plus ample et plus lumineux, portait le nom de Lai de Leithian, « Libération de l'Enchaîné ». Il contait l'amour entre Beren, homme mortel errant dans les bois du Beleriand, et Lúthien Tinúviel, fille du roi elfe Thingol et de Melian la Maia. Pour obtenir sa main, Beren dut affronter mille périls, jusqu'à pénétrer au cœur même d'Angband et y dérober un Silmaril à la couronne de Morgoth. Aux côtés de Lúthien, dont le chant surpasse toute magie, il triompha là où tous avaient échoué. Leur union, scellée par la douleur, la mort et le chant, devint la plus haute légende des Jours Anciens ; une histoire d'amour, de courage et de sacrifice que les Eldar chantaient encore longtemps après la chute des étoiles.
Autour de ces deux œuvres, Christopher Tolkien offrit des commentaires détaillés, révélant les versions successives, les hésitations du poète, et les premiers pas d'un monde encore mouvant. Il exposa les choix métriques de son père, la richesse des formes poétiques empruntées à la tradition médiévale, ainsi que les différences avec les versions ultérieures du Silmarillion.
Les Lais du Beleriand témoignaient ainsi de l'ambition poétique de Tolkien : faire revivre, en langue moderne, l'éclat épique et la noblesse des chants anciens, à travers la forme la plus haute du mythe ; celle qui naît du vers et s'inscrit dans la mémoire des peuples.